- Par Mona Lederman
Anita (Svetlana Zill et Alexis Bloom, 2023) nous présente un nouveau portrait de l’actrice et mannequin Anita Pallenberg. En utilisant des passages du manuscrit autobiographique découvert par ses descendant·e·s après sa mort, la voix de Scarlett Johansson narre ces mots encore inédits.
De manière chronologique, le documentaire nous conte tout ce qu’elle a vécu en nous montrant des images et des vidéos que les écrans n’avaient pas pu encore présenter au monde. Immédiatement, le film nous emporte. Nous sommes amené·e·s à écouter, regarder, ressentir. L’aura charismatique d’Anita Pallenberg nous envoûte. Les intervenant·e·s le disent également : elle avait un quelque chose, une force d’attraction, une énergie qui attire. Avec humour et tendresse, le film nous guide à travers une vie si remplie, si surprenante !
Agréablement, le film montre les diverses facettes qui font d’une personne un être complexe, sans spécialement en prioriser l’une ou l’autre : on a vu Anita Pallenberg en tant qu’actrice, modèle, mère, muse, jeune fille, intellectuelle, héroïnomane, cheffe de la maison. Elle est un tout, une combinaison de tous ces rôles et le film nous le montre bien.
Le documentaire fonctionne en arborescence : lorsque qu’un·e témoin, plus ou moins éloigné d’Anita Pallenberg, est mentionné, les prochaines minutes lui sont consacrées, parfois tout à fait en dehors de son rapport avec l’actrice. Ainsi, le film parle d’elle, mais également de Volker Schlöndorff, Brian Jones, Keith Richards, Marianne Faithfull, Kate Moss, des voisin·e·s, des ami·e·s proches, etc. C’est donc à travers ses relations sociales, professionnelles, amicales et sentimentales que nous la découvrons, ce qui nous permet de ressentir l'essence même de sa vie, de celles et ceux qui l’entouraient. Le seul bémol, c’est que cela n’est pas toujours fait avec les intervenant·e·s. Le documentaire semble demander à son public de déjà connaître l’entourage d’Anita Pallenberg.
Visuellement, le film est composé d’images d’archives, de films sur pellicule et d’interviews. Le montage se permet de ne pas prendre en compte les règles conventionnelles quant au respect de l’intégrité des archives, en ajoutant des effets visuels et sonores lorsque les psychédéliques servent de sujet central. Si un film a l’ambition de présenter des images d’archives en tant qu’objets historiques, celles-ci doivent être montrées dans leur état d’origine. Léger bémol.
Concernant Scott Cantrell, un adolescent de dix-sept ans qui avait des relations sexuelles avec Anita, le film reste très pudique. Il y a une intention claire de parler de cet évènement de la manière la plus rapide possible, car il n'est pas possible de l'éviter mais il ne présente pas Anita Pallenberg sous son meilleur jour. Son âge n’est d'ailleurs jamais clairement exprimé (« il avait entre dix-sept et dix-huit ans »). La « voix » d’Anita Pallenberg n’en parle presque pas, y compris sur la mort de celui-ci. Peut-être avait-elle elle-même évité le sujet dans son autobiographie, conseillée par ses avocats ?
En dehors de ces deux points, le film est très agréable et donne une envie folle de dévorer la filmographie d’Anita Pallenberg : Barbarella (1962) ou encore Performance (1970)…
Texte très intéressant et personnel sur Anita et remarque très juste sur la manipulation des archives ! Merci Mona! D'ailleurs au cas où vous n'avez pas vu "nos années super 8" d'Annie Ernaux, il y a une utilisation très intéressante des archives dedans (hélas parfois manipulées mais commentées par l'ecrivaine)